Planète Pub

Campagnes choc en prison : la pub va-t-elle trop loin ?

Deux campagnes tournées dans des prisons, avec de vrais délinquants et criminels, ont été diffusées sur la toile ces derniers jours. Alors, tentatives malsaines de créer le buzz ou brillantes idées créatives ?

 

Première campagne : Persil au Royaume-Uni.

Depuis une dizaine d’année, la marque de lessive essaie de convaincre les consommateurs que « Dirt is good » (la crasse, c’est bien). Sous-entendu : plus vous vous salissez, plus vous achèterez notre produit. Malin. Aujourd’hui, la marque cherche à promouvoir les activités de plein air pour les enfants (car on se salit plus dehors que dedans). D’où ce film, tourné dans le quartier de haute sécurité d’une prison américaine, expliquant qu’aujourd’hui, les enfants passent moins de temps dehors que des criminels incarcérés !

Cette campagne pose plusieurs problèmes. D’abord la comparaison est malsaine : elle sous-entend que les enfants vivent dans des conditions moins enviables que les détenus d’une prison américaine de haute sécurité. Ensuite, la généralisation est abusive : la campagne dit « les enfants », mais l’étude sur laquelle elle se base n’a été menée que dans une dizaine de pays riches, où les mômes peuvent se permettre de rester le cul posé devant des écrans à bouffer des saloperies sucrées vendues par la pub. Pas sûr que les gamins des rues de Mumbai, Djakarta, Sao Paulo, etc. aient tout à fait le même rapport aux « activités extérieures ». Enfin, tout ça sent fort l’hypocrisie mercantile. Le directeur de création qui a conçu cette campagne a déclaré : « Nous savions qu’une idée traditionnelle ne serait pas suffisante pour susciter le débat autour de ce problème dramatique ». Traduction : « Il nous fallait une idée bien racoleuse et polémique pour faire le buzz et vendre le maximum de lessive. »

Deuxième campagne : la Croix-rouge en Pologne.

Pour inciter la population à apprendre les gestes qui sauvent, la Croix-rouge polonaise a donné des cours de premiers secours à des meurtriers purgeant leur peine. Ceux qui ont tué pourront ainsi se « racheter » en sauvant des vies. Sous-entendu : si même eux peuvent le faire, pourquoi pas vous ?

Derrière le propos choc et polémique, cette campagne incite à réfléchir aux notions de rédemption, de réinsertion et de responsabilité. Bref, une campagne intelligente et utile qui ne cherche pas à choquer pour le simple buzz mais pour la bonne cause.

Morale de cette histoire : n’en déplaise à certains publicitaires, il y a une différence entre vendre des barils de lessives et sauver des vies.