C’est une manie dans notre société moderne que de vouloir coller des étiquettes. Pour connaître les prix, le poids ou la composition d’un produit, mais aussi pour mieux nous connaître nous-même !
Chez les hommes par exemple, on nous a d’abord expliqué qu’un mec de moins de 35 ans citadin sans orientation sexuelle définie et grand consommateur de produits de beauté était un MétroSexuel. Puis, que son voisin plus riche en testostérone, assumant et bichonnant ses poils était un ÜberSexuel. Puis, qu’une fois en paix avec lui-même, ayant su concilier virilité, créativité, sensibilité, séduction et charisme l’homme devenait de facto un Novocasual : un homme idéal fantasmé par les marques de cosmétiques comme l’Oréal, … apte à consommer tous les produits Men Expert et Studio Line.
Et voilà que depuis quelques temps, un petit nouveau fait son apparition dans notre paysage : le « manfluencer ». Son nom ne vous dit peut-être pas grand chose, et pourtant, vous en connaissez. Peut-être même en êtes-vous un ? Mi homme (man) mi influenceur il est apparu, comme souvent, aux États-Unis, lorsque la crise a renvoyé des centaines de milliers de salariés dans leur maison, dont une majorité d’hommes. Devenus malgré eux des hommes au foyer, il leur a fallu tuer le temps et surtout assurer l’intendance pour permettre à l’unique source de revenu du ménage, Madame, de se concentrer sur sa mission. Et comme on pouvait s’y attendre, ce nouveau statut d’homme au foyer impliqué dans les tâches ménagères_ et plus particulièrement les courses_ n’a pas échappé aux marques.
« Le monde est devenu très complexe et peuplé d’individus multifacettes. On a beaucoup parlé de l’évolution de l’image et de la place de la femme dans notre société, mais elle n’a été possible que parce que celle de l’homme aussi a changé. Aux États-Unis, la moitié des hommes est impliquée dans les courses. » explique Maria Galleriu, directrice du planning stratégique de l’agence BETC. Une étude réalisée en juin 2013 outre-atlantique par le cabinet Midan Marketing a effectivement révélé que 47 % des 18 à 64 ans assuraient au moins la moitié de ces tâches -cuisine, ménages, courses- et 58 % d’entre eux – les fameux Manfluencers – assumaient seuls la responsabilité des courses pour le ménage !
Il n’en fallait pas tant pour inciter les marques a déployer une communication spécifique à cette cible, riche en références ou en clichés masculins. Reste à savoir si la méthode est la bonne, notamment en France. Pour Harpic, la réponse semble être oui à en croire ce spot.
« En matière d’achat ménager, le fait d’être un homme ne change en principe rien sur les achats, rappelle Maria Galleriu. C’est le profil de chacun et ses valeurs qui influence l’acte d’achat. Soit la marque décide de s’adresser à l’homme pour lui vendre des produit d’homme, à la manière de Coca Zéro, avec un message du genre « je ne mange plus de sucre, mais j’ai toujours des c******s » (ndlr, mais la cible n’est pas spécifiquement le manfluencer). Soit elle veut lui vendre les mêmes produits qu’à sa femme en s’appuyant sur une des facettes de l’homme, ce qui paraît le plus pertinent. » C’est ce que fait Bonduelle depuis 2008 avec un papa non seulement capable de faire réchauffer une poêlée de légumes, mais qui sait aussi argumenter sur ses bienfaits. Un comme ce que faisait déjà Vedette en 1971.
S’il semble bien être devenu une cible pour les marques en France, où la moitié des hommes de 18 à 24 ans déclare participer à part égale aux tâches ménagères (source : Harris Interactive, décembre 2012), le manfluencer n’est quand même pas la nouvelle ménagère de moins de 50 ans. Tout au plus il est une ménagère comme les autres.