« Contrex, votre corps est pour. » Nous aussi. Plus on regarde le dernier film de la marque, plus on est pour d’ailleurs. Au départ, on s’est interrogé. Tout à coup, la marque venait bousculer une vie entière de promesses de minceur. Aretha Franklin ne reprenait pas les notes de Françoise Hardy remasterisée pour Contrex dans les années 90. La voix off tout droit sortie de Grey’s Anatomy ne nous faisait miroiter ni ventre plat ni bourrelets envolés.
« Rien ni personne ne peut nous arrêter. Il n’y a pas de limites à ce que nous pouvons accomplir. »
À la fois, on ne peut qu’adhérer… Surtout face à ces portraits de femmes épuisées, harassées, magnifiées dans leur sommeil par Frédéric Planchon à la réalisation.
« Nous sommes invincibles ». Voilà dans quels termes la nouvelle campagne de Contrex a vaincu nos préjugés sur la capacité de la marque à se sortir du carcan dans lequel on la croyait enfermée à jamais : le culte de la minceur.
Car en plus de six décennies de communication la marque n’était jamais vraiment sortie de son ruisseau. Pourtant de l’eau a coulé sous les ponts depuis la première prise de parole de Contrex. C’était en 1954, un an après que Perrier a racheté la marque, l’a sorti des linéaires des pharmacies pour la propulser en tête de gondole des grandes surfaces. « L’homme moderne a les reins solides. Il boit Contrexéville » clamet—elle alors en 4×3. « Affinez contre taille en lavant vos reins » propose son pendant féminin. « Contrex, source de minceur »
Le succès est tel qu’un an plus tard, la marque suspend sa campagne, faute de pouvoir satisfaire le torrent de clients séduit par cette offre !
Elle ne cessera par contre jamais de surfer cette vague, pendant plus de 60 ans, incitant les Françaises et les Français à soigner leurs reins et leurs chutes de reins à grandes gorgées d’eau : « Une taille, deux hanches, trois raisons de boire Contrex », « Une Contrex par jour contre les kilos », « Contrepoids à la fatigue et à la gourmandise », « Mince !… elle boit Contrex »…
Dans les années 70, elle se fait même un peu donneuse de leçons avec des slogans-sentence type « Aide-toi… Contrex t’aidera » ou encore « Contrex ne peut rien pour vous si votre choix c’est vivre pour manger ». Et quand elle débarque en télé, au bras de feu l’agence Langelaan & Cerf, sa promesse coule de source.
Les hommes ne sont pas en reste, « Non, la balance ne vous ment pas, vous êtes trop gros. Mettez-vous au régime et buvez Contrex. » Quand ce n’est pas la balance ou l’ascenseur qui refuse de démarrer tant qu’il ne se sera pas délester d’un peu de poids, c’est la femme soucieuse de la ligne de son mec, et de la santé de son ménage, qui lui tendra sans ménagement sa bouteille d’eau minérale.
Le message est clair comme de l’eau de roche, mais aussi lourd que ce dernier jeu de mots.
Contrex décide donc de changer de ton et propose aux femmes d’opter pour le « contrat minceur ». Les relations contractuelles entre les marques et leurs clients étant à la mode depuis la fin des années 70 du fait d’un certain Darty .
Dans les années 80, conscient d’avoir peut-être poussé le bouchon un peu loin dans la sévérité et l’austérité, celui qui deviendra « le partenaire minceur » de ces dames leur fait la cour à grand renfort de déclaration d’amour. Claude Lelouch expert en la matière s’associe à cette initiative en nom propre, dans un film où il n’est plus question ni de kilos ni de régime. Les films se suivent et se ressemblent mais le message semble s’être dilué quand l’agence Australie récupère le bébé. Elle signera l’un des films les plus mémorables de la marque : la plage, confié à Bettina Reims et bercé par la voix de Tchéky Karyo, excusez du peu.
C’est également elle (l’agence) qui intronisera ces quelques petits notes de piano qui suffisent aujourd’hui encore à évoquer la marque dans l’esprit de nombreuses femmes. Un titre de Françoise Hardy écrit par Gainsbourg quelques années plus tôt « Comment te dire Adieu ». Les paroles remasterisées pour l’occasion seront reprises et détournées dans une version paillarde devenue tout aussi culte, preuve s’il en est du succès de l’initiative.
S’en suivra une décennie de films publicitaires complices entre des femmes résolues à croquer la vie à pleine dents tout en surveillant leur ligne. Qui en éliminant le superflu grâce à Contrex, qui en luttant contre ses propres démons arme au poing, qui en cédant à la psychologie positive, en se laissant convaincre qu’elle est belle. À la fois si Olga Kurylenko n’y arrive pas…
Et puis, comme si tout avait été dit… silence radio. Depuis 2006, la marque semblait avoir disparu du paysage. Son retour en 2011 à travers un film super ludique dans lequel un banc de jeunes femmes déshabillait virtuellement une silhouette masculine dessinée par des néons sur un mur, à grand coup de pédales, avait ravi les foules. Une opération et un film qui marquaient le début d’une nouvelle histoire publicitaire, écrite par Marcel. Deux ans plus tard, l’agence et l’annonceur donnaient un petit frère à cette belle opé, et rien ne laissait présager qu’ils changeraient à ce point d’orientation ensemble.