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Yves St Laurent, le mauvais goût au rendez-vous ?

« Femmes-objets », « Images dégradantes », « Valorisation de l’anorexie », « Incitation au viol », les plaintes reçues par l’Autorité de Régulation de la Publicité (ARPP) continuent de se multiplier en attendant que le Jury de Déontologie Publicitaire se prononce, vendredi prochain, sur la dernière campagne d’Yves St Laurent.

Au coeur de ce haut-le-coeur général, deux visuels : sur le premier, une femme en talons et résilles abandonne aux regards des passants ses jambes écartées ; sur le second, une autre, perchée sur talons-aiguilles à roulettes, semble offrir son fessier à qui le lui prendra.

Capture Twitter de l’une des affiches mise en cause

Au-delà du calendrier, en pleine journée de lutte pour le droit des femmes (à commencer par celui au respect), on se demande comment une marque comme Yves St Laurent peut, à ce point, ne pas avoir appris de ses erreurs.

Car en visitant le site du Jury de Déontologie Publicitaire, on découvre que le dernier avis rendu public par les jurés concernait déjà l’annonceur. Et plus précisément une campagne diffusée dans Le Monde en décembre dernier : une femme assise, tête penchée en avant, bras écartés, et poitrine nue portait son sac à main en guise de culotte.

Saisi de plusieurs plaintes de particuliers, ainsi que de l’Association Les Chiennes de garde, le Jury en avait informé la société. Les motifs de plainte résonnent : l  annonce, « qui utilise la nudité, véhicule une image humiliante et dégradante de la femme, et est sexiste en ce qu’elle « hyper-sexualise » la femme, assimilée à une marchandise ou à un bien de consommation. ». Lundi 6 mars, soit le jour même du tollé provoqué par ces deux nouvelles affiches, le jury considérait officiellement ces plaintes fondées !

 

En janvier 2016, c’était une affiche pour le rouge à lèvres Rouge Pur Couture qui heurtait la susceptibilité du public, auquel les jurés donnaient encore raison.

Entendu à cette occasion, l’annonceur promettait pourtant que « la marque est particulièrement soucieuse du respect des règles déontologiques applicables en matière de publicité et plus généralement du cadre légal en vigueur, et a à cœur de communiquer de manière responsable sur ses produits ».

Pas tant que ça visiblement.

En attendant les délibérations du Jury, l’instance de régulation, qui n’avait pas été consultée avant l’affichage en 4×3 dans Paris de cette dernière campagne, a d’ores et déjà signifié à Yves St Laurent sa désapprobation, en lui demandant expressément de retirer ses visuels des panneaux d’affichage.

« On peut y voir à la fois une atteinte à la dignité de la personne, une représentation de soumission non conforme aux règles édictées par l’ARPP, énumère son DG, Stéphane Martin, qui souligne l’absence de connivence de la jeune fille mise en scène avec un visage totalement inexpressif et une absence totale de second degré », faisant référence au second visuel mis en cause. Deuxième mauvais point, « l’extrême maigreur du sujet, sans doute induite par l’angle de prise de vue, est contraire aux valeurs sociétales défendues par l’ARPP » et représente un second motif de plainte sur lequel le jury devra statuer.

Un motif que connait bien l’annonceur puisqu’en 2015, une de ses campagnes avait été interdite au Royaume-Uni, le mannequin y apparaissant « maladivement maigre « .

« Depuis le premier jour d’existence du jury de déontologie publicitaire l’image de la femme a été le sujet majoritairement invoqué par les plaintes » expliquait Valérie Michel-Amsellem, la présidente du jury dans le dernier bilan sur la publicité et l’image de la personne de l’ARPP. Un bilan somme toute très positif puisque sur près de 63 000 publicités examinées entre 2014 et 2015, seuls 29 posaient problème.

99,95 % des publicités diffusées en France respecte donc l’image des personnes mises en scènes ou visées. Alors, bien sûr, il y a de quoi s’agacer d’un tel manque de sagacité de la part d’Yves St Laurent, mais on peut aussi se féliciter de l’état général de la publicité française et des prises de parole de Contrex ou encore d’Axa sur la place des femmes dans la société. Mais ça, on y reviendra, la semaine prochaine, ici-même.